L’histoire de Philippa : vivre avec le syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur
Comprendre le SDCSS
Philippa est atteinte du syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur (SDCSS), maladie rare qui cause des troubles de l’équilibre. Le SDCSS est une anomalie du développement qui intervient dans les trois premières années de la vie. On pense qu’elle est due à une insuffisance de la croissance osseuse dans le canal supérieur de l’oreille interne, à l’origine d’une minuscule ouverture de ce canal.
Cette maladie a été découverte en 1995 par le Docteur Lloyd Minor, oto-rhino-laryngologiste, professeur à l’École de médecine de l’Université John Hopkins, à Baltimore (États-Unis). Le Dr Minor a pu établir un lien entre les symptômes étranges rencontrés chez certains patients et une étude faite sur des pigeons, qui avait montré une corrélation entre des mouvements oculaires spécifiques et un canal de l’oreille interne endommagé.
« Certains de mes premiers patients m’étaient envoyés par des psychiatres. J’ai découvert que le problème dont ils souffraient venait bien de leur tête, mais pas au sens où on l’entendait tout d’abord », expliquait le Dr Minor lors d’un discours prononcé en 2011. Le son ou la pression peuvent activer de manière anormale les canaux qui servent à l’équilibre, dans l’oreille, causant un large éventail de symptômes gênants et handicapants.
« Ces trous dans l’os (un de chaque côté pour environ la moitié des patients, dont moi) sont minuscules, mais leurs effets sont très importants, témoigne Philippa. Le SDCSS n’est pas aussi rare qu’on l’a d’abord cru (cette malformation concerne entre 1 et 2 % de la population), mais face à une maladie invisible de ce type, sensibiliser le public reste un vrai défi. On estime que 10 % des patients souffrant de vertiges chroniques pourraient être atteints du SDCSS, resté dans bien des cas non diagnostiqué. »
À la recherche d’un diagnostic
« Lorsque j’avais une vingtaine d’années, je sentais bien que quelque chose n’allait pas. J’avais souvent la nausée, des vertiges, parfois les deux, et peu à peu ma confiance en moi s’amenuisait, se souvient Philippa. Documentaliste pour une maison d’édition, je passais beaucoup de temps à la British Library, ce que j’adorais. Mais l’idée de me déplacer de ma table à la banque de prêt a commencé à m’angoisser. Le bruit des chariots roulant le long des rayonnages ou en train d’être rangés me mettait mal à l’aise ou provoquait chez moi de l’anxiété. J’ai mis ça sur le compte de crises de panique. Les mêmes sensations sont peu à peu apparues dans d’autres contextes, mais avec de grandes variations, ce qui ajoutait à ma perplexité. Ces problèmes ont continué jusqu’à ce que j’aie la quarantaine. Puis, un jour, en 2003, en avion, un changement de pression soudain pendant la descente a déclenché tous les symptômes. L’intérieur de ma tête me faisait l’effet d’un ballon que j’avais absolument besoin de faire éclater. »
Les patients symptomatiques se présentent chez leurs médecins avec une grande diversité de témoignages, aussi beaucoup de cas ne sont-ils pas détectés. Pour Philippa, obtenir un diagnostic a pris quatre ans. Pendant cette période ses symptômes évoluaient subtilement. « Les maux de tête s’aggravaient, la nausée était persistante, ma vision, souvent brouillée, et il m’était très pénible de devoir hausser la voix, chanter ou manger des aliments croustillants. J’avais du mal à entendre les gens dans les environnements bruyants, et en même temps j’étais hypersensible à certains sons comme les claquements de porte ou le tintement d’une cuiller qui tombe par terre. Je ne savais pas que mes problèmes d’équilibre antérieurs étaient liés à ces nouvelles difficultés, ou que les longs crissements de mon cou ou les cliquetis produits par mes yeux pouvaient avoir un sens. »
La voie chirurgicale
À l’époque où Philippa est allée consulter un spécialiste, d’abord à la recherche d’un autre dysfonctionnement inhabituel, la béance tubaire – dans laquelle la trompe d’Eustache, qui relie l’oreille moyenne au rhinopharynx, ne reste pas fermée –, elle était souvent prise de vertiges brutaux et n’osait plus conduire. Du fait de ces nombreux symptômes, la vie de Philippa, déjà compliquée puisqu’elle avait un enfant lourdement handicapé, était devenue un combat quotidien, terriblement isolant. Un scanner vint alors confirmer le diagnostic de SDCSS.
« J’ai été aiguillée vers la chirurgie, ce qui aurait dû permettre une amélioration. Mais la procédure expérimentale utilisée a été un fiasco. J’en suis sortie encore amoindrie, victime de douleurs et de terribles vertiges, explique Philippa. Au bout de 18 mois, épuisée, Philippa a été consulter le Dr Gerard Gianoli en Louisiane. C’est lui qui a compris que son SDCSS était en fait bilatéral. Il a alors effectué une opération correctrice du côté gauche. Il a aussi expliqué à sa patiente toutes ses années d’anxiété. « Les crises de panique sont dues à une trop grosse quantité de catécholamine, une substance chimique, dans le sang. Une stimulation vestibulaire anormale peut causer sa surproduction. »
« Dans mon cas la chirurgie était un choix évident, car la maladie avait pris le contrôle de ma vie, estime Philippa. Mais il y a des risques importants, on peut perdre l’ouïe ou subir des lésions nerveuses. Ces opérations ne vous guérissent pas du jour au lendemain, le cerveau doit s’ajuster. J’ai été opérée avec succès du côté droit en 2012, mais j’entends toujours des sifflements dus à des acouphènes pulsatifs. Le côté gauche, le premier opéré, reste malheureusement problématique, en raison d’un syndrome nerveux rare lié au SDCSS. Je dois vivre avec ces symptômes omniprésents. »
Pour en savoir plus
Visionnez une vidéo dans laquelle le Dr Isaac Yang, neurochirurgien à UCLA, explique les symptômes fréquents de la déhiscence du canal semi-circulaire supérieur et les meilleurs traitements de cette maladie.
Pour plus d’informations sur le SDCSS, rendez-vous sur www.scdssupport.org.
Eva Bearryman, Junior Communications Manager, EURORDIS
Traducteur : Trado Verso