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août 2009

Dysmélie : Björn Håkansson, victime suédoise de la thalidomide


Portrait d’un militant européen : Björn Håkansson, victime suédoise de la thalidomide

Björn and Hannah Håkansson | Björn et Hannah Håkansson |Björn y  Hannah Håkansson | Björn e Hannah Håkansson | Björn und Hannah  HåkanssonBjörn Håkansson, Président de l’association suédoise contre la thalidomide (FfdN), est né en Suède en 1960 avec une dysmélie, qui se caractérise chez lui par une malformation des bras, avec 3 doigts à chaque main (il ne peut se servir que de deux). Sa mère s’était vu prescrire de la thalidomide pendant sa grossesse pour lutter contre des troubles du sommeil suite à la perte de deux enfants dans un accident de voiture. Björn Håkansson raconte : « Mes parents n’ont su que les comprimés de thalidomide étaient à l’origine de dysmélie que lorsque j’avais deux ans. »

Peu de médicaments sont d’aussi triste mémoire que la thalidomide. Introduite à la fin des années 50, elle a été prescrite comme somnifère ou contre les nausées matinales des femmes enceintes. Elle est à l’origine de malformations congénitales chez des milliers d’enfants dans le monde (selon les estimations, plus de 10 000 bébés ont été touchés, dont 4 000 en Europe). En Suède, 170 bébés sont nés avec des malformations dues à la thalidomide entre 1957 et 1963. 118 ont survécu.

« Je pense avoir pris conscience de ma différence vers l’âge de 5 ou 6 ans. Mais mon enfance a été tout à fait normale. Ma famille vivait dans un petit village, j’allais à l’école avec mes amis d’enfance et j’apprenais comme tout le monde », se souvient Björn Håkansson. Le Président de l’association suédoise de la thalidomide était même plutôt sportif ! « Je jouais au tennis, au football et suis arrivé troisième au championnat de tennis de table de l’école », raconte-t-il fièrement.

De 1963 à 1975, Björn a séjourné régulièrement dans un service spécial pour les victimes de la thalidomide au foyer Eugenia à Stockholm, où des formations spécifiques leur apprenaient notamment à être indépendants au quotidien : se doucher, s’habiller, utiliser un stylo, etc. Ce service pluridisciplinaire composé de kinésithérapeutes et d’orthopédistes a été créé par les pouvoirs publics suédois.
Étonnamment, les malformations de Björn Håkansson posaient moins problème que le fait qu’il soit gaucher ! Il raconte ainsi : « Écrire de la main gauche dans les années 60 était mal vu. Mes enseignants et les orthopédistes insistaient toujours sur ce point. » Alors qu’il avait sept ans, il a même reçu une prothèse lui permettant de manger de la main droite, mais il l’a enfoui dans les bois dès son retour à la maison !

ThalidomideEn 1984, Björn a participé à la première réunion annuelle de l’association suédoise contre la thalidomide, à laquelle son père appartenait depuis 1962, et a été immédiatement élu membre du conseil d’administration. Björn Håkansson travaillait alors à temps plein comme analyste dans une sucrerie. En 1993, il démissionne pour se lancer dans un ambitieux projet de l’association suédoise contre la thalidomide : « Nous voulions créer un centre d’expertise pour les victimes de la thalidomide et j’ai supervisé ce projet pendant 6 ans. Ce centre a été fondé en 1993 à l’hôpital de la Croix rouge à Stockholm. » Le Ex-Center fonctionne toujours, accueillant des victimes de la thalidomide, des malades atteints de dysmélie et des amputés de Suède et d’Europe.
Aux yeux de Björn Håkansson, ce centre est l’une de ses plus grandes réalisations : « Il s’agit du premier centre d’expertise à avoir été fondé par une association d’handicapés en Suède et à fonctionner sur la même plate-forme qu’un hôpital. »

Un autre temps fort de la vie de militant et de victime de la thalidomide de Björn Håkansson a été marqué en 2001 par la décision du gouvernement suédois de dédommager les victimes de la thalidomide. « Ils ont versé 55 000 euros par personne », raconte Björn. Depuis 1970, les victimes suédoises perçoivent également, deux fois par an, une compensation versée par l’entreprise pharmaceutique qui a commercialisé la thalidomide. Björn Håkansson sait que, par rapport à d’autres victimes, les Suédois sont « chanceux » : « Dans certains pays comme l’Italie, aucun dédommagement n’a jamais été accordé. »

Ann  and Hannah Håkansson | Ann et Hannah Håkansson |Ann y Hannah Håkansson |  Ann e Hannah Håkansson | Ann und Hannah HåkanssonBjörn Håkansson s’occupe actuellement d’un autre projet, initié par les associations suédoise et britannique de lutte contre la thalidomide : le centre européen d’information de référence sur la dysmélie (European Dysmelia Reference Information Centre – EDRIC). Et Björn Håkansson d’expliquer : « Nous avons réalisé que les personnes spécialisées dans la thalidomide vieillissent et disparaissent. Aujourd’hui, les nouveaux nés atteints de dysmélie ne rencontrent parfois jamais les médecins capables de traiter leurs malformations. Aussi le projet EDRIC collectera t il les informations disponibles – de nature médicale et historique – pour aider les gens partout en Europe. »

Björn Håkansson est marié à Ann, elle aussi victime de la thalidomide. Leur maison, au sud de la Suède, est adaptée à leurs handicaps : « Notre maison ressemble à toutes les autres, mais à y regarder de plus près, nous avons des équipements spéciaux. Dans la cuisine par exemple, nos placards n’ont pas de poignée mais un bouton sur lequel il suffit d’appuyer pour faire descendre les étagères. Ma femme a une chaise spéciale qui s’élève et lui permet d’accéder aux choses avec ses pieds. Et nous fermons la maison avec une télécommande. » Ces adaptations ont été financées par leur collectivité locale.

Björn et Ann ont une fille, Hannah. « Nous lui avons expliqué comment nos mères s’étaient vu prescrire un médicament à l’origine de nos malformations. Elle a dit qu’elle savait que les gens étaient différents les uns des autres, qu’à l’école par exemple, certains enfants étaient roux et qu’elle nous aimait comme nous étions, que rien d’autre n’avait d’importance. »

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Auteur : Nathacha Appanah
Traduction : Trado Verso
Photos : toutes les photos à l’exception de Thalidomide © Paul Hansen/DN

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