En influant sur les processus décisionnels, les patients créent une situation gagnant-gagnant
En rassemblant plus de 150 participants, l’Événement politique organisé par EURORDIS à Bruxelles pour la Journée internationale des maladies rares a connu un succès sans précédent. À cette occasion, le colloque « Rares mais réelles : les maladies rares » a vu intervenir des patients, mais aussi le commissaire européen à la santé Vytenis Andriukaitis et le député belge au Parlement européen Philippe De Backer. Ces intervenants ont débattu du rôle des patients dans le processus décisionnel, soulignant combien cette participation influe positivement sur les politiques relatives aux maladies rares.
Conçu suivant un nouveau format, l’événement comprenait quatre tables rondes, dont chacune présentait des interactions réussies entre patients et diverses parties prenantes. Ce colloque pouvait également être suivi dans le monde entier, puisque le site Internet d’EURORDIS le retransmettait en direct (vidéo disponible sur EURORDIS TV). Des internautes se sont ainsi connectés depuis plus de 30 pays.
Le commissaire européen Vytenis Andriukaitis a ouvert les débats en déclarant : « Je suis persuadé que l’action menée au niveau européen peut faire la différence. Cette action peut aider à améliorer la vie des personnes atteintes de maladie rare, la vie de tous ceux et toutes celles qui éprouvent des difficultés à trouver l’expertise, rare, pour diagnostiquer et soigner leur maladie. Je m’engage à travailler avec EURORDIS et toutes les parties prenantes afin de maximiser cette action et trouver des solutions européennes afin de traiter les maladies rares. »
Kathy Redmond, éditrice du magazine Cancer World et modératrice de l’événement, a lancé les débats en soulignant combien le fait d’inclure le point de vue des patients dans le processus décisionnel profite à toutes les parties prenantes, et pas uniquement aux patients, d’où une situation gagnant-gagnant pour toutes les personnes impliquées.
Bojana Mirosavljevic, mère d’un patient atteint de la maladie de Batten, a raconté avec émotion son combat incessant pour faire changer la loi sur le dépistage prénatal. Elle a expliqué toutes ses difficultés à obtenir un diagnostic et une assurance pour sa fille Zoya, décédée de la maladie de Batten en 2006. Cette maladie n’avait aucun code dans le système de santé serbe, rendant impossible l’accès au traitement et le remboursement des thérapies ou de tout autre soin de santé. Bojana et son mari ne voulaient pas qu’une autre famille connaisse la même expérience ; ils sont parvenus à faire modifier la législation serbe (avec la loi Zoya), qui exige désormais des médecins d’envoyer des prélèvements à l’étranger si aucun diagnostic n’a été posé en six mois. Les familles dont un enfant vit avec une maladie génétique peuvent accéder gratuitement au dépistage prénatal, pour tous leurs membres. Hajrija Mujovic Zornic, consultante juridique à laquelle on doit certains articles de la loi Zoya, a commenté : « Lorsque Bojana m’a contactée, il était évident que de faire entendre la voix de patients aiderait non seulement Bojana mais aussi un grand nombre de familles touchées par une maladie rare. »
Le parlementaire européen Philippe De Backer a parlé très clairement des changements nécessaires en Europe : « L’accès aux soins et aux traitements varie encore énormément d’un État membre à l’autre. Instaurer une structure européenne commune est la seule façon de rendre cet accès possible à tous. Il en résultera un système plus juste et plus transparent, qui permettra en définitive d’améliorer l’accès des patients. »
Philip Watt, Directeur général de l’association irlandaise de patients atteints de la mucoviscidose Cystic Fibrosis Ireland, a évoqué le rôle décisif que son organisation a joué en Irlande en renversant la décision relative au remboursement d’un médicament contre la mucoviscidose. Suite aux actions de l’association et à une campagne de sensibilisation, plus de 100 patients ont pu accéder à ce médicament, qui améliore nettement la qualité et l’espérance de vie. Ri De Ridder, Directeur général de RIZIV-INAMI, a enrichi le débat en insistant sur l’importance de reconnaître qu’en matière d’évaluation du remboursement de médicaments, les patients accordent souvent plus d’importance à la qualité de vie qu’à l’espérance de vie. Il a expliqué que cela avait été fait en Belgique au travers d’un cadre décisionnel multicritères.
Carla Fladrowski, mère d’un patient atteint de scérose tubéreuse, a expliqué avoir collaboré avec une entreprise pharmaceutique à la conception d’un protocole d’essai clinique. Elle a aussi témoigné devant l’auditoire combien, au moment où le diagnostic a été posé pour son fils, elle n’avait pas pris conscience de l’importance de participer à ce processus. Et de commenter : « Les parents de patients atteints de maladie rare constituent le liant entre les différents professionnels de santé impliqués dans le traitement d’un patient. Je dois mon émancipation au fait d’être experte de ma maladie. »
Appuyant le témoignage de Carla, Veronica Foote du groupe Novartis a commenté : « Il faut former les patients pour qu’ils sachent comment s’impliquer de façon appropriée. Mais il est aussi indispensable que scientifiques et cliniciens comprennent l’importance d’un tel dialogue avec les patients. Rien n’est plus gratifiant pour les chercheurs que de rencontrer ces patients qu’ils aident en fin de compte. La Charte d’EURORDIS pour les essais cliniques dans le domaine des maladies rares a été essentielle en ce sens. »
Helma Gusseck, patiente atteinte de rétinite pigmentaire, et Nathalie Bere de l’Agence européenne des médicaments (EMA) ont discuté de la contribution d’Helma à une procédure de conseil scientifique à l’EMA. Helma a souligné qu’une bonne coopération entre patients-experts, l’EMA et une entreprise pharmaceutique offre aux patients une excellente occasion de promouvoir la dernière étape avant la mise sur le marché de nouvelles thérapies. Grâce à des initiatives comme l’Université d’été d’EURORDIS, les patients peuvent apprendre à plaider leur cause. Helma explique : « L’Université d’été d’EURORDIS a été un processus d’apprentissage important ; j’ai constaté une grande différence entre ma première et ma quatrième visite à l’EMA. Il me semble que mes propos sont beaucoup plus écoutés aujourd’hui qu’à première participation. » Nathalie a ajouté que 50 % des contributions de patients à l’assistance au protocole consistent au final à conseiller une entreprise.
Terkel Andersen, Président d’EURORDIS, a conclu l’événement en constatant : « Aujourd’hui, nous avons entendu plusieurs témoignages sur les défis auxquels patients et parents sont confrontés au jour le jour. Nous avons aussi compris le courage supplémentaire dont ils doivent faire preuve et les efforts qu’ils doivent fournir pour influer sur une politique. »
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Eva Bearryman, Junior Communications Manager, EURORDIS
Traducteur : Trado Verso